AMATEURISME ET ÉLECTORALISME

AMATEURISME ET ÉLECTORALISME

Publié dans La Presse, le 1er octobre 2012 :

J’étais un de ceux qui se réjouissaient du résultat des dernières élections : les libéraux perdent le pouvoir tout en demeurant à seulement quatre sièges derrière le PQ; la CAQ fait moins bonne figure que prévu et devra faire ses classes avant d’aspirer à gouverner ; et le PQ prend le pouvoir, mais est minoritaire, ce qui devrait l’empêcher de mettre en oeuvre les éléments les plus radicaux de son programme.

Disons que ma réjouissance a été de courte durée. J’accepte qu’avec un nouveau gouvernement, il y a et il doit y avoir une période normale d’apprentissage, car il n’est pas toujours évident de passer des banquettes de l’opposition à celles du pouvoir. Mais force est de conclure que l’amateurisme et l’électoralisme dont fait preuve le PQ après seulement quelques semaines au pouvoir sont sans égal dans l’histoire du Québec.

D’une part , la simple sagesse aurait voulu que le PQ commence par connaître l’état réel des finances publiques en analysant les dernières prévisions de croissance de l’économie et en formulant un plan précis du quand et du comment mettre en place ses promesses électorales. Mais plutôt que d’agir ainsi, Pauline Marois a décidé, dès sa première journée au pouvoir, d’annoncer la fermeture de Gentilly-2 sans en connaître les coûts, d’annoncer l’abolition de la taxe santé sans savoir exactement comment elle sera remplacée, et d’annoncer l’abolition de la hausse des droits de scolarité tout en gardant les mesures que le PLQ avait mises en place pour en atténuer les conséquences. Allez-y comprendre quelque chose ! Malheureusement , cela semble être le style que Pauline Marois veut imposer : tirer d’abord et poser des questions ensuite. Pas fort, comme dirait l’autre!

D’autre part , comment peut-on changer fondamentalement la fiscalité du Québec sans en connaître les potentielles répercussions négatives ? Le Québec ne vit pas en cercle fermé et une augmentation substantielle de l’impôt des « riches » a des conséquences. C’est tout simplement le reflet de notre système d’imposition.

S’il y a une réduction des impôts, les « riches » vont en profiter plus que les « pauvres » et resteront plus riches, c’est une réalité. Mais s’il y a une augmentation de l’impôt des « riches » , plusieurs parmi ces derniers vont aller vivre ailleurs. À ce moment- là, non seulement le gouvernement ne bénéficiera pas d’une augmentation de ses revenus, mais perdra ce qu’il avait déjà. Ça devient de l’amateurisme fiscal quand on additionne les plus, mais qu’on ne soustrait pas les moins, et qu’on veut le faire de façon rétroactive.

Le problème est amplifié quand le gouvernement ajoute de l’électoralisme pur et simple à cette donnée quand même simpliste. Et c’est exactement ce que le PQ est en train de faire : opposer les riches aux pauvres de façon à pouvoir rapatrier les votes de Québec solidaire aux prochaines élections.

Les Québécois exigent de la sagesse et de la réflexion de la part de leur premier ministre ou première ministre, indépendamment de leurs croyances politiques. Mais il est évident que Pauline Marois est en train de bousiller l’avantage politique qu’elle a d’être la première femme premier ministre du Québec. Pourtant, Mme Marois elle-même avait probablement géré plus de ministères que n’importe quel autre politicien dans l’histoire moderne du Québec. Pourquoi alors cet empressement à tirer sur tout ce qui bouge comme si elle était encore dans l’opposition et à faire de l’électoralisme de basse- cour?

Si Mme Marois continue comme ça, elle va vite nous faire regretter les libéraux.

Publié par Gaétan Frigon