L’ANGLAIS D’HIER ET L’ANGLAIS D’AUJOURD’HUI

L’ANGLAIS D’HIER ET L’ANGLAIS D’AUJOURD’HUI

Notre histoire est jonchée de situations qui ont eu pour effet de nous inciter à protéger et à promouvoir la langue française au Québec. Toutefois, cette promotion a trop souvent pris une forme plus anti-anglaise que pro-française. L’idée était d’empêcher nos jeunes d’apprendre l’anglais trop vite de peur qu’ils ne s’anglicisent. Mais il est temps que notre vision de la langue anglaise change. L’anglais d’hier que nous avons si longtemps combattu n’existe plus. L’anglais d’aujourd’hui n’est plus la langue du vainqueur britannique mais plutôt la langue internationale imposée par l’hégémonie américaine depuis la fin de la 2ième guerre mondiale.

Le Québec d’aujourd’hui doit s’adapter à cette réalité au risque de perdre tout avantage concurrentiel dans ses relations avec les autres pays. En fait, dans l’histoire du monde, il y a toujours eu une langue plus ou moins dominante. Le latin a longtemps été cette langue. Le français l’a également été surtout au niveau diplomatique. Il y a eu des essais pour que l’esperanto devienne langue mondiale mais cela n’a pas réussi. Aujourd’hui, il n’y a plus qu’une seule langue qui peut être qualifiée d’internationale, et c’est l’anglais. Si un chinois veut faire affaire avec un allemand, les chances sont qu’ils le feront en anglais. Si un japonais veut faire affaire avec un espagnol, les chances sont qu’ils le feront également en anglais. Et si un québécois veut faire affaire avec un coréen, les chances sont qu’ils le feront aussi en anglais. Si vous faites le tour du monde, l’anglais devient la langue passe-partout qui vous permet de bien vous faire comprendre par à peu près tout le monde où que vous soyez, et ce, sans égard au statut politique du pays où vous vous trouvez.

J’en ai personnellement fait l’expérience dans de nombreux voyages à travers le monde où ma connaissance du français était totalement inutile mais où j’aurais été perdu sans une connaissance approfondie de l’anglais. Même dans les grandes villes de Chine, les pancartes annonçant les noms de rues sont en mandarin et en anglais. Un pays comme le Vietnam, dont la majorité des habitants parlaient encore le français il y a quelques décennies, a changé du tout au tout. Aujourd’hui, seuls les gens de plus de 50 ans parlent encore parfois le français alors que les plus jeunes apprennent l’anglais comme langue seconde et le parlent couramment. Le même phénomène se produit aussi en Italie où la langue seconde la plus parlée n’est plus le français mais l’anglais. Au Québec, notre réaction face à l’anglais est encore négative à cause de notre histoire et c’est malheureux car cela nous amène dans un cul-de-sac. C’est un signe de ce que nous avons été mais non un signe de ce que nous devons devenir en tant que peuple émancipé.

Que l’on soit d’accord ou pas, nos jeunes seront éventuellement perdants s’ils ne maitrisent pas l’anglais tout simplement parce que les jeunes d’ailleurs eux vont le maitriser. Il va falloir qu’en tant que peuple, nous soyons assez matures pour mettre de coté l’anglais symbole de la domination britannique et adopter l’anglais devenu par la force des choses la seule langue internationale. Ce faisant, les québécois démontreront clairement qu’ils ont atteint la maturité linguistique en étant capables de vivre et de travailler en français chez eux sans pour autant écraser l’anglais, langue devenu incontournable comme langue seconde pour bien faire face à l’avenir. En fait, dans la plupart des pays non-anglophones, les gouvernements font tout en leur pouvoir pour s’assurer que leurs jeunes apprennent l’anglais le plus tôt possible. Il ne faudrait surtout pas que le Québec devienne la seule nation au monde où les jeunes sortent de l’école sans maitriser la seule langue qui leur permettra de bien se faire comprendre ailleurs sur la planète. Maitriser l’anglais comme langue seconde est une priorité pour tous les québécois, fédéralistes comme souverainistes. Sinon, on deviendra tout simplement un ghetto francophone sans avenir.

Publié par Gaétan Frigon