UN JUSTE MILIEU

UN JUSTE MILIEU

Publié dans La Presse, le 1er avril 2013 :

Les gouvernements successifs m’ont toujours semblé respecter la consigne selon laquelle un parti au pouvoir ne doit jamais changer d’idée, même devant l’évidence que la décision prise est mauvaise. Il appert qu’ils craignaient comme la peste que cela soit vu comme un signe de faiblesse qui donnerait des munitions aux partis de l’opposition.

Le meilleur défenseur de cette façon d’agir s’appelle Jean Charest. Ce dernier pouvait, lorsqu’il était premier ministre, refuser carrément de reculer, même devant l’évidence que ledit refus allait empirer les choses. Il en faisait, en quelque sorte, une question de principe, préférant souvent se tirer dans le pied plutôt que de se rendre aux arguments logiques de l’opposition.

Deux exemples me viennent en tête. Le premier concerne les défusions des villes faisant partie de la grande Ville de Montréal. Au risque de tout bousiller, Jean Charest est allé de l’avant avec sa promesse faite aux anglophones de permettre le démembrement des villes fusionnées sous le gouvernement du Parti québécois. Le résultat a été rien de moins qu’une nouvelle Ville de Montréal ingouvernable avec 21 roitelets. Ce fut là une erreur fondamentale qui a contribué aux échecs d’aujourd’hui.

Le deuxième exemple concerne l’industrie de la construction. Pendant des années, Jean Charest a refusé de même considérer la mise sur pied d’une commission d’enquête, sachant que, politiquement, une telle commission pourrait lui coûter cher. Et il a créé la commission Charbonneau seulement lorsque les circonstances ne lui en ont plus donné le choix. Le Parti libéral du Québec en paie le prix aujourd’hui.

Au début du mandat de Pauline Marois comme première ministre, j’ai vu comme un élément positif le fait qu’elle n’hésitait pas à faire marche arrière lorsqu’il était évident qu’elle allait frapper un mur. J’ai vu cela comme un vent de fraicheur, comme un signe d’ouverture en ce sens qu’elle n’érigeait plus en système le fait de ne jamais céder devant l’adversaire, devant la critique populaire.

Cependant, les reculs répétés de Pauline Marois ont vite fait de changer la donne. Elle change tellement souvent d’idée que ce qui était un signe de flexibilité et de souplesse de sa part est rapidement devenu un signe de faiblesse, le signe de quelqu’un qui ne sait pas où elle s’en va. En fait, Pauline Marois a changé d’idée sur à peu près tous les grands dossiers qu’elle a eu à affronter.

En fait, si je voulais qualifier sa façon d’agir, je ne sais trop si je devrais dire qu’elle avance en arrière comme un passager dans un autobus, ou qu’elle recule en avant comme le faisait Michael Jackson avec sa fameuse danse, le moonwalk. Mais dans un cas comme dans l’autre, c’est devenu une risée. Il semble que Pauline Marois tire en premier et pose des questions après. Admettons que ce n’est pas la bonne façon de gouverner. Il faut réfléchir avant et non après avoir pris des décisions.

Disons qu’entre la rigidité à outrance d’un Jean Charest et les volte-face à répétition d’une Pauline Marois, il doit certes y avoir un juste milieu, à savoir être rigide lorsque la situation l’exige et faire volte-face lorsque la situation l’exige. Mais présentement, il est très difficile, outre la gouvernance souverainiste, de suivre l’idéologie mise de l’avant par Pauline Marois.

Publié par Gaétan Frigon