LA SANTÉ À L’AMÉRICAINE
LA SANTÉ À L’AMÉRICAINE
Publié dans La Presse, le 21 avril 2014.
Au Québec, ce sont les patients qui se font compétition pour se trouver unmédecin de famille alors qu’aux États-Unis, ce sont les médecins de famille qui se font compétition pour se trouver des patients.
Je connais peu de Québécois qui voudraient changer notre système de santé pour un système à l’américaine, lequel, outre les programmes gouvernementaux Medicaid et Medicare (et maintenant «Obamacare»), demeure un système privé payé à la base par des assurances individuelles ou de groupe plutôt que par les taxes et impôts.
Pour une otite, unQuébécois doit souvent se rendre aux urgences et y attendre plusieurs heures avant de voir un médecin.C’est donc dire que de nombreux Américains sont par la force des choses laissés pour compte du fait qu’ils n’ont pas les moyens de se payer une assurance.
Cependant, outre l’aspect financier et l’aspect universalité, il est difficile de porter un jugement de valeur sur la qualité du système de santé aux États-Unis à moins d’avoir eu à l’utiliser, ce que je n’avais jamais eu à faire malgré de très nombreuses semaines passées aux États-Unis au cours des dernières décennies.
Et voilà qu’en décembre dernier, ma conjointe se réveille un matin avec ce qui semblait être une sévère otite. Oups ! Qu’est-ce qu’on fait? Une recherche sur Google avec les motsclés (en anglais) : « Médecin de famille, sans rendez-vous, Fort Lauderdale» nous permet d’avoir un choix considérable. Nous prenons l’adresse du médecin le plus proche et décidons de nous y rendre, sans même appeler.
Une réceptionniste nous reçoit et remet un questionnaire simple à remplir. Après tout au plus 25 minutes d’attente, un médecin d’origine sud-américaine vient chercher ma conjointe. Voyant son nom francophone, il insiste pour lui parler en français, une langue qu’il maîtrise relativement bien. Il prend le temps d’écouter, de questionner et de bien examiner. Il lui donne l’impression qu’elle est la seule personne qu’il a à soigner et il prend tout le temps nécessaire.
Le diagnostic est celui que l’on pensait, et il ne reste qu’à recevoir une prescription et payer la visite, laquelle coûte 85$. Quant à la prescription, il offre soit de nous en remettre une pour aller à la pharmacie de notre choix, soit de la remplir lui-même sur le champ. Nous choisissons cette dernière option, laquelle coûte 48$, et payons le tout pour un total de 133$, montant qui sera remboursé par notre assurance-voyage.
Une expérience satisfaisante
Mais le meilleur était à venir: le lendemain après-midi (c’était un samedi), ma conjointe reçoit un appel du même médecin qui veut s’informer de sa condition, à savoir si les antibiotiques avaient commencé à faire effet. Il renouvelle ses conseils, lui disant de ne plus faire de longs voyages, par temps frais, avec le toit de l’auto baissé… Et il termine la conversation en lui disant que, si elle avait été bien servie, de ne pas oublier de le laisser savoir aux Québécois qu’elle connaît et qui pourraient avoir besoin d’un bon médecin de famille en Floride. En conclusion, on peut dire que notre première expérience médicale aux États-Unis a été plus que satisfaisante.
C’est alors que j’ai pensé à ce qui se passe dans une situation semblable au Québec, c’est-à-dire une personne qui n’a pas de médecin de famille et qui a une otite. Il est obligé de se rendre aux urgences d’un hôpital et d’attendre des heures avant de voir un médecin, en plus, évidemment, de prendre la place de quelqu’un d’autre dont la situation exigerait des soins immédiats. La différence? Au Québec, ce sont les patients qui se font compétition pour se trouver un médecin de famille alors qu’aux États-Unis, ce sont les médecins de famille qui se font compétition pour se trouver des patients. Il y a quand même de bons côtés à un système privé.