LES FINANCES DU QUÉBEC : UNE MISSION IMPOSSIBLE

LES FINANCES DU QUÉBEC : UNE MISSION IMPOSSIBLE

Il y a une job au Québec que je ne voudrais pas avoir pour tout l’or du monde. C’est celle de Ministre des Finances, la job de Raymond Bachand. Tout simplement parce que c’est une mission impossible, une mission de pelletage continu par en avant. Pour s’en rendre compte, on n’a qu’à regarder ce qui s’est passé depuis l’adoption de la loi sur le déficit zéro et on se rendra compte que la dette totale du Québec a augmenté de beaucoup depuis ce temps. En fait, il n’y avait rien de bien compliqué pour appliquer cette loi. Il fallait simplement s’assurer que tout nouveau programme s’autofinance selon la formule de l’utilisateur-payeur ou qu’on augmente les taxes et/ou les impôts d’un montant équivalent au coût des nouveaux programmes de façon à ce que les revenus consolidés du gouvernement n’en soient pas affectés. Il n’y avait aucune autre façon de respecter l’esprit de cette loi du déficit zéro. Pourtant, les gouvernements successifs ont tour à tour ajouté des programmes sans s’assurer que les revenus, qu’ils proviennent des utilisateurs ou du fonds consolidé, égalent les dépenses.

En voici deux exemples : l’assurance-médicament est un programme fantastique pour toute la population mais, comme il n’est pas autofinancé, le manque à gagner vient obligatoirement du fonds consolidé de la province. Même chose pour les garderies à 5$ (aujourd’hui à 7$), un programme bien pensé mais dont plus de 80% du coût total vient lui aussi du fonds consolidé du gouvernement. Et dans ces deux cas, on ne parle pas de ‘’pinottes’’ mais de centaines de millions de dollars récurrents par année. Et qu’a fait le gouvernement lorsqu’il a réussi à obtenir un montant substantiel du gouvernement fédéral pour régler le déséquilibre fiscal? Il a redonné aux citoyens un montant équivalent en baisses d’impôts plutôt que de l’utiliser pour augmenter ses revenus et ce, pour des raisons strictement politiques. Pourtant, je ne connais personne dans mon entourage qui exigeait une telle baisse d’impôt considérant la situation précaire des finances du Québec.

Aujourd’hui, la dette totale du Québec dépasse 150 milliards de dollars et elle continue d’augmenter année après année. Nos programmes existants sont tous sous-financés ou à la limite de l’acceptable. Par exemple, il faudrait ajouter quelques milliards par année en santé uniquement pour mettre le système à niveau. Même chose pour l’éducation. Même chose pour les routes. Même chose pour le transport en commun. Même chose pour le paiement de la dette. En fait, j’estime que, pour maintenir les services sans retomber en déficit, pour mettre en place les nouveaux services exigés par la population et pour commencer à payer les dettes accumulées depuis le début des années 60, le gouvernement du Québec devrait avoir jusqu’à dix milliards de dollars par année de plus en revenus. Évidemment que c’est irréaliste mais il faut commencer quelque part. On ne peut pas regarder du coté fédéral dont les transferts au Québec atteignent déjà 8 milliards de dollars par année et qui est lui-même pris avec un déficit dépassant 50 milliards de dollars. On ne peut pas augmenter indument les impôts qui sont déjà parmi les plus élevés en Amérique du Nord. Il faut donc regarder dans notre propre cour et arrêter de conter des peurs au monde : si on ne fait rien dès maintenant, imaginez ce que ce sera avec le vieillissement rapide de la population. En fait, le choix qui s’offre au gouvernement n’est pas très compliqué. Ou bien il coupe dans les services. Ou bien il augmente les impôts et les taxes. Ou bien il augmente le coût de services particuliers pour qu’ils s’autofinancent. Ou bien il augmente le coût de produits tels l’électricité. Je ne dirai pas à Raymond Bachand ce qu’il devrait faire parce que c’est lui qui est élu et payé pour prendre de telles décisions. Mais je lui dirai que, en tant que citoyen, je suis prêt à payer plus cher pour moins de services car, autrement, ce seront mes enfants et mes petits-enfants qui en subiront les conséquences et ils ne la trouveront pas drôle.

Publié par Gaétan Frigon