POSTES CANADA A RAISON

POSTES CANADA A RAISON

Publié dans La Presse, le 25 février 2014:

Depuis le début de l’ère moderne, au gré des changements technologiques et des changements dans les habitudes d’achat, de nouveaux types d’emplois voient le jour alors que d’autres disparaissent. C’est dans la nature des choses. Il est évident que, lorsque cela arrive, celui qui perd son emploi est dévasté et met de la pression sur son syndicat pour qu’il agisse de façon à ce que son emploi ne soit pas aboli.

Le cas des typographes me vient en tête. Pendant des décennies, ces derniers ont fait la pluie et le beau temps, sachant qu’un journal ne pouvait être publié sans leur apport. Puis, avec les avancées technologiques, les typographes ont commencé à perdre leur ascendant, car il n’était plus nécessaire de placer des lettres de métal les unes après les autres pour monter un journal.

Mais les typographes ont refusé d’accepter cette réalité et ont fait des grèves historiques pour que les entreprises de presse continuent à monter leurs journaux selon la vieille méthode. C’était évidemment peine perdue. Les grèves ont perduré, mais, à la fin, la fonction de typographe a cessé d’exister.

Aujourd’hui, avec l’arrivée de l’internet, un phénomène semblable affecte tout ce qui dépend, directement ou indirectement, de l’imprimerie. Et c’est le cas pour la distribution du courrier, car, justement, il y a beaucoup moins de courrier traditionnel à livrer qu’il y a quelques années. Les gens communiquent par courriel, reçoivent leurs comptes par l’internet, n’envoient plus de cartes de Noël, etc. Ce n’est rien de moins que la fin d’une époque. D’une belle époque, peut-être, mais qui tire à sa fin.

Une décision logique

Devant cette situation, Postes Canada a annoncé la fin de la distribution du courrier porte-à-porte là où ce service existe encore. C’est une décision logique, mais le syndicat des postiers ne la voit pas de la même façon, sachant qu’elle signifie, à terme, la disparition même de la fonction de postier, donc la diminution du nombre de membres syndiqués, tout simplement parce qu’il n’y aura plus de courrier à livrer. Et quelle est la réaction du syndicat des postiers ? Il exige que Postes Canada se lance dans les succursales bancaires, oubliant que le nombre desdites succursales est lui-même en diminution constante, car les gens font de plus en plus leurs transactions par l’internet.

En d’autres termes, le syndicat des postiers veut que Postes Canada aille faire de l’argent dans un domaine qui n’est pas le sien et que les profits ainsi engrangés, si profit il y a, servent à subventionner le service postal à domicile, assurant ainsi le maintien d’emplois qui ne sont plus nécessaires. Pour une logique, j’ai déjà vu mieux.

Je me souviens que, lorsque Postes Canada a décidé, en 1993, d’acheter Purolator, les syndicats ont protesté, disant que leur employeur s’alliait à l’ennemi. Pourtant, aujourd’hui, Purolator, avec quelque 1000 employés, est la seule division de Postes Canada en croissance et avec une capacité de faire compétition aux américaines UPS et FedEx. Force est de reconnaître que l’achat de Purolator a été une sage décision, car, si on peut envoyer du courrier par l’internet, ce n’est pas et ne sera jamais le cas pour un colis.

Conséquemment, il serait ridicule et contre toute logique de trouver des solutions artificielles pour sauver des emplois dans la distribution du courrier, d’autant plus qu’aucun postier ne perdra son emploi avec l’abolition de la livraison à domicile. Il ne sera tout simplement pas remplacé quand il prendra sa retraite. Postes Canada a raison dans ce dossier.

Publié par Gaétan Frigon